Comprendre les fondamentaux de la photographie pour améliorer ses images
Il y a quelques jours, ma sœur m’a demandé de lui expliquer les bases de la photo afin qu’elle puisse mieux comprendre comment utiliser son appareil, sans pour autant rentrer dans la technique et les mathématiques.
J’ai alors relevé le défi et, après coup, profité d’écrire cet article en constatant que l’angle adopté pour présenter le sujet l’avait semble-t-il réconcilié avec son appareil photo.
Plutôt que de rentrer dans une approche technique et technologique pour aborder le sujet, j’ai alors voulu recentrer la présentation par un angle plus pratique visant à comprendre les effets qu’ont les réglages de l’appareil sur la photo finale. L’objectif recherché ici est de comprendre comment on construit une photo avec son appareil et quelles sont les limites et difficultés auxquelles les photographes sont confrontés dans la réalité.
Cet article est donc adapté pour les personnes n’ayant aucune compétence particulière en photographie, il vise à aborder la photo à celles et ceux n’ayant jamais tenu un appareil de sa vie et/ou n’ayant jamais compris comment celui-ci fonctionnait.
📷 Si vous avez un appareil photo chez vous, gardez-le à portée de main pour expérimenter par vous-même les points qui seront abordés dans l’article.
☕ Préparez-vous un café, un thé, ou toute autre boisson que vous appréciez, et je vous souhaite une bonne lecture. 🙂
🎧 Cet article est un peu long (estimé à 15 minutes), pour vous reposer l’esprit pendant la lecture je vous propose comme accompagnement Cluster One et Marooned de l’album The Division Bell des Pink Floyd.
Table des matières
Les paramètres fondamentaux de la photographie
Le but d’une photographie est de capter la lumière d’un sujet et d’une scène. C’est cette lumière qui, depuis le sujet jusqu’à la surface photosensible de votre appareil, va créer la photo. L’objectif premier du photographe et donc de maîtriser la quantité de cette dernière qui arrive sur le capteur afin d’obtenir une photographie exposée de la façon que vous le voulez.
Pour cela, et quel que soit l’appareil photo que vous tenez dans votre main, du daguerréotype du milieu du 19e siècle au smartphone à 14 objectifs dernier cri en passant par le petit compact premier prix et l’appareil photo reflex professionnel aussi cher qu’une voiture, l’appareil photo vous mettra à disposition trois paramètres incontournables et indispensables pour maîtriser cette lumière :
- le temps d’exposition ;
- l’ouverture ;
- et la sensibilité.
Chacune de ces composantes va impacter la lumière incidente sur votre capteur et donc votre photographie. C’est donc ces trois paramètres que nous allons voir et tenter de comprendre ici pour savoir comment les manipuler afin d’obtenir la photographie souhaitée.
Ces trois paramètres combinés forment ce qu’on appelle le triangle d’exposition, dans le sens ou la modification d’un ou plusieurs de ces composantes va modifier la quantité de lumière incidence sur votre capteur, et donc l’exposition.
Le temps d’exposition
Le temps d’exposition, définit en seconde, correspond à la durée à laquelle le capteur est exposé à la lumière ambiante et donc à la scène.
Sur l’appareil photo, c’est l’obturateur qui permet de contrôler ce temps d’exposition. Celui-ci est composé d’un rideau, plus ou moins ouvert selon le temps voulu, qui balaye devant le capteur.
Plus ce temps est long, plus la quantité de lumière qui arrive sur le capteur est importante, et donc plus la photo sera lumineuse.
Concrètement, lorsque vous photographiez un sujet, le temps d’exposition de votre photo sera fortement dépendant de la luminosité ambiante de votre scène :
- une photo réalisée en pleine journée au soleil demandera un temps d’exposition plus court qu’une même photo réalisée sous un ciel voilé ;
- une photo de nuit demandera un temps d’exposition beaucoup plus long qu’une photo de jour afin d’obtenir la même quantité de lumière sur le capteur.
En plus de la luminosité ambiante de la scène, le type de sujet photographié va avoir une influence importante sur le temps d’exposition à choisir pour réaliser la photo. En effet, plus le sujet sera rapide (oiseau, voiture de course, etc.), plus le temps d’exposition devra être court afin de figer le sujet sur la photo.
Comme on le voit sur les trois photos ci-dessus, le texte au centre du vinyle est d’autant plus flou que le temps d’exposition est long. Par conséquent, certains sujets, si vous les souhaitez nets, vont imposer à vos réglages un temps d’autant plus court qu’ils sont rapides. Au contraire, si vous souhaitez un sujet flou, il faudra alors augmenter ce temps d’exposition.
On aborde ici le premier compromis auquel vous devrez faire face lors de sa prise de vue entre la luminosité ambiante de la scène et la vitesse du sujet sur le temps d’exposition. Parfois il n’y a pas de solution idéale, il faudra faire choix.
L’ouverture
L’ouverture, notée sur les appareils photo F/<nombre> ou parfois F<nombre> (F/2.8, F11 par exemple), correspond au diamètre du diaphragme présent à l’intérieur de l’objectif.
Le diaphragme est un élément mécanique présent dans l’objectif constitué de lamelles qui peuvent s’ouvrir ou se fermer de la même façon que le fait la pupille de l’œil.
Plus l’ouverture du diaphragme est importante, plus celui-ci laisse passer de la lumière au travers l’objectif, par conséquent plus l’image obtenue sera lumineuse.
Par conséquent, quand votre scène est peu lumineuse, vous avez la possibilité d’ouvrir davantage le diaphragme pour augmenter la quantité de lumière incidente sur le capteur.
L’ouverture a cependant une seconde conséquence sur la photo obtenue, en plus de la luminosité. En effet, plus le diaphragme est ouvert, plus la profondeur de champ sur la photo sera courte. La profondeur de champ correspond à une certaine distance devant et derrière votre sujet qui sera nette. Au-delà de cette distance l’image sera floue.
Comme on le voit sur les trois photos ci-dessus, le troll en arrière plan est d’autant plus flou que l’ouverture est grande.
Ici encore, c’est le sujet et la scène qui vont conditionner le choix de l’ouverture par le photographe pour, par exemple, isoler un sujet de son environnement, en portrait notamment, ou, au contraire, obtenir le maximum de netteté sur l’ensemble de la photo pour un paysage.
On touche ici le deuxième compromis à faire à propos de l’ouverture. Dans la quête éternelle de lumière qu’est la pratique de la photographie, avoir l’ouverture la plus grande possible est le Graal, mais celle-ci s’obtient au détriment de la profondeur de champ de la scène ce qui peut entrer en contradiction avec le résultat souhaité.
La sensibilité
La sensibilité du capteur (ou de la pellicule), notée en ISO (100 ISO, 3 200 ISO, etc.) correspond à la capacité qu’à la surface photosensible à « capter » la lumière incidente. Dans le cas des capteurs numériques, la sensibilité se caractérise par une amplification numérique du signal incident : une image réalisée à 200 ISO correspond à une amplification par 2 du signal reçu par une image qui aurait été réalisée à 100 ISO. Par conséquent, plus la valeur de la sensibilité est importante, plus l’image sera lumineuse comme le montre les images ci-dessous.
Selon la scène que vous avez en face de vous, il vous sera alors possible d’augmenter la luminosité sur la photo en augmentant cette sensibilité. Attention, il n’y a dans ce cas pas plus de lumière incidente sur le capteur contrairement au temps d’exposition et l’ouverture, ce n’est qu’une augmentation artificielle de la lumière en amplifiant le signal mesuré par le capteur.
Comme pour le temps d’exposition et l’ouverture, il y a alors un effet collatéral lorsque la sensibilité devient trop importante. En effet, plus cette dernière est élevée, plus l’image sera dégradée et présentera du bruit.
Selon le type d’appareil que vous avez, la perte de qualité liée à l’augmentation de la sensibilité peut devenir très importante, il faut par conséquent garder celle-ci la plus basse possible.
Troisième compromis à faire dans la réalisation d’une photo, la sensibilité pourra vous permettre d’obtenir une image plus lumineuse quand la scène ne l’est pas suffisamment (intérieur peu éclairé, lumière du soir, concert). Cependant, plus la sensibilité sera importante, plus votre image sera dégradée. C’est donc un critère à manier avec parcimonie et la plupart du temps chercher à minimiser le plus possible, quand cela l’est.
Une photo c’est choisir le meilleur compromis entre les trois paramètres
Comme nous venons de le voir, l’exposition d’une photo est directement dépendante des trois paramètres suivants : le temps d’exposition, l’ouverture et la sensibilité. Ces trois paramètres sont aussi interdépendants, cela signifie que la modification de l’un impactera les autres à une exposition constante :
- réduire le temps d’exposition vous obligera à augmenter l’ouverture ou augmenter la sensibilité ;
- réduire l’ouverture de l’obturateur nécessitera d’avoir un temps d’exposition plus long ou d’augmenter la sensibilité ;
- diminuer la sensibilité obligera d’augmenter le temps d’exposition ou d’augmenter l’ouverture.
Selon le type de sujet et de scène, vous devrez trouver le meilleur compromis entre ces trois paramètres afin d’obtenir la photo exposée comme vous le souhaitez, avec la netteté du sujet voulue, la profondeur de champ voulue et la sensibilité la moins élevée possible.
En bref, faire une photo, c’est résoudre une équation à 3 inconnues de tête en une fraction de seconde, et c’est compliqué.
Heureusement, la technologie des appareils modernes permet de nous aider dans cette tâche en réduisant le nombres de variables, et c’est ce que nous allons voir maintenant.
🎧 Avant de passer à la suite, je vous propose une petite pause, allez réchauffer votre boisson ou vous servir un second verre pour l’occasion. Je suppose à ce moment-là votre musique est terminée aussi, je vous propose maintenant Riviera Paradise interprété par Stevie Ray Vaughan pour la seconde moitié de l’article.
Quelles solutions pour se faciliter la tâche ?
À peu près tous les appareils photo modernes proposent des modes de prise de vue plus ou moins automatisés que je vais lister ici.
Les modes automatiques
Les modes automatiques des appareils, ou parfois appelés mode scène (fête, portrait, paysage, macro, etc.) sont des modes où l’appareil décide de l’intégralité des paramètres vu précédemment : le temps d’exposition, l’ouverture et la sensibilité. Vous n’avez alors plus qu’à appuyer sur le bouton pour obtenir la photo. C’est simple et rapide, cependant les réglages choisis par l’appareil sont arbitraires et généralement pas adaptés à la photo que vous aviez en tête initialement au risque d’être déçu du résultat.
Je déconseille donc généralement de les utiliser au profit des modes semi-automatiques qui laissent plus de choix personnels dans la réalisation d’une photo.
Les modes semi-automatiques
Il existe deux modes semi-automatiques qui permettent à l’utilisateur de fixer manuellement un des réglages et de laisser l’appareil choisir les deux autres :
- priorité ouverture (mode A ou Av pour aperture ou aperture value) : dans ce mode, c’est à vous de choisir l’ouverture du diaphragme et l’appareil calcule le temps d’exposition adapté afin d’obtenir la bonne luminosité sur la photo ;
- priorité vitesse (mode S ou Tv pour speed ou time value) : dans ce mode, c’est à vous de choisir le temps d’exposition et l’appareil calcule l’ouverture adaptée afin d’avoir la bonne exposition sur la photo.
Comme vous le voyez, ces modes ne concernent que le temps d’exposition et l’ouverture. La sensibilité, comme dit plus haut, reste le plus souvent un paramètre à minimiser le plus possible, les appareils photo proposent généralement un mode pour la régler automatiquement (cf. la documentation de votre appareil photo).
Au final, grâce à ces deux modes, plutôt que de résoudre de tête une équation à 3 inconnues, il ne vous en reste plus qu’une seule à déterminer.
Le mode manuel
Le dernier mode proposé par l’appareil, appelé mode manuel (ou M), laisse l’utilisateur gérer tous les paramètres à la main.
Bien que plus complexe à manipuler, ce mode peut avoir un intérêt dans certaines situations où on ne souhaite pas que les réglages varient entre deux photos, par exemple pour les panoramas ou les timelaps.
Quand utiliser les modes A ou S ?
C’est ici que ce que j’ai détaillé plus haut va intervenir. Le temps d’exposition et l’ouverture ne sont pas juste des concepts techniques et abstraits, ils sont des outils laissés à l’utilisateur pour faire des choix personnels sur le rendu souhaité de sa photo : le temps pour avoir un effet de flou plus ou moins important sur un sujet, l’ouverture pour contrôler directement la profondeur de champ et isoler un sujet de son environnement.
Par conséquent, c’est généralement le sujet que vous souhaitez photographier qui va déterminer le mode à choisir.
Si celui-ci est rapide, il peut être plus intéressant de choisir le mode priorité vitesse pour assurer un temps suffisamment court pour le figer, ou, au contraire, contrôler son flou de déplacement.
Si au contraire vous voulez jouer sur la profondeur de champ pour obtenir un sujet net sur toute l’image (photo de paysage par exemple), c’est alors plutôt le mode priorité ouverture qui sera à privilégier.
Dans la pratique
La photographie, ce n’est au final qu’une histoire de compromis, et c’est d’ailleurs en ça que c’est une activité intéressante je trouve.
Parfois les conditions permettent de faire ce que l’on veut facilement, en pleine journée avec un sujet statique par exemple. Mais souvent, ce n’est pas le cas et il faut alors trouver une solution pour trouver le meilleur compromis entre les trois réglages pour obtenir la photo que l’on souhaite faire.
Dans votre pratique, vous serez confrontés à deux types de contraintes :
- Contraintes liées à la scène : une photo de nuit sera plus contraignante qu’une photo de jour vu que la lumière ambiante est plus faible. Une photo de moto sur piste sera plus contraignante qu’une photo d’une fleur. Chaque scène va vous limiter plus ou moins sur le choix des réglages à utiliser. Plus l’un de ces réglages sera contraint par la scène, plus il vous faudra faire des concessions sur les deux autres :
- avoir un paysage net sur toute la photo imposera une faible ouverture pour augmenter la profondeur de champ ;
- avoir un sujet dynamique net sur la photo imposera un temps d’exposition très court ;
- obtenir une cascade d’eau avec un effet filé demandera d’augmenter le temps d’exposition ;
- faire un portrait demandera d’avoir une grande ouverture pour isoler le sujet de son environnement en raccourcissant la profondeur de champ ;
- faire une photo macro demandera une grande profondeur de champ ;
- etc.
- Contraintes liées au matériel : prendre une photo d’un rapace de nuit en train de chasser avec un smartphone sera techniquement impossible. Selon les modèles et performances des appareils que nous utilisons, ces derniers ne nous permettront pas de faire tout ce que nous souhaitons :
- plage de vitesse : généralement entre 30 secondes et 1/4 000 de seconde, 1/8 000 sur des appareils plus haut de gamme ;
- plage d’ouverture : l’ouverture maximale est déterminée par le type d’objectif que vous utilisez. Si votre objectif a une ouverture maximale de F/5.6, il vous sera alors impossible d’avoir une ouverture plus grande comme F/4 ou F/2.8 ;
- plage de sensibilité : là encore, certains capteurs ne pourront pas monter très haut en sensibilité et au-delà de 6 400 ISO la photo devient de très mauvaise qualité. Au contraire, certains boîtiers peuvent aller jusqu’à 12 800 ISO, voire 25 600 ISO tout en conservant une qualité d’image exploitable sur un logiciel de traitement d’image.
À propos des contraintes liées à la scène, il sera difficile de les éviter, à moins de trouver des solutions détournées pour réaliser la photo tout de même (flash, filtres, trépied, etc.), ou tout simplement admettre qu’il ne sera pas possible de faire la photo telle que vous ne l’imaginiez.
Pour les contraintes techniques là encore il faudra trouver d’autres stratagèmes pour pallier la limitation, c’est avec l’expérience et votre imagination que vous pourrez les dépasser. L’autre solution sera sinon de changer de matériel pour gagner en libertés de choix : objectif plus lumineux, boîtier plus rapide, capteurs plus sensibles au détriment du coût, du poids, de l’encombrement.
En conclusion
J’espère qu’après ces quelques explications (un peu longues, j’espère ne pas vous avoir assommé, c’est difficile d’être synthétique) et surtout les différents exemples en guise d’illustrations, vous soyez un peu plus à l’aise avec votre appareil photo et les différents outils que ce dernier vous propose pour réaliser vos photos.
Il n’y a en soi rien de très compliqué dans le fonctionnement des réglages présentés ici et ils peuvent se visualiser relativement simplement. Le plus important à retenir de cet article, ce n’est pas tant comment fonctionne votre appareil photo, ça au fond on s’en fout un peu, mais surtout de savoir ce que les réglages que vous allez choisir dessus vont avoir pour conséquence sur votre photo, et ça c’est ce qui vous importe.
Maintenant que vous avez lu cet article jusqu’au bout, bravo !, je ne peux que vous conseiller de passer à la pratique, encore et encore, pour bien assimiler ces concepts et tester, encore et encore, sur des cas simples pour bien se rendre compte des effets qu’ils ont sur vos photos. Plus vous pratiquerez, plus vous serez à l’aise avec eux et plus vous arriverez à avoir les photos que vous souhaitez et plus vous prendrez de plaisir à faire des photos. 😉
Enjoy. 📸